Dans l’attente de toi est un livre d’Alexis Jenni qui avait écrit (vous vous en souvenez certainement) l’Art de la Guerre. Il avait obtenu ainsi le prix Goncourt en 2011 …déjà ?
L’écrivain nous dresse ici à la manière d’un peintre, le portrait d’une femme qu’il aime par la description du ressenti de la main sur son corps. D’habitude lorsque l’on parle d’une personne on dit souvent qu’elle est bavarde ou étrange ou jolie ou toujours pressée, bref des adjectifs qualifiant plutôt des attitudes, des traits de caractère, mais pas exclusivement le physique.
Par ce récit, mi-essai amoureux, l’auteur se livre à une peinture du toucher. C’est complexe à saisir au départ, puis au fil des pages, on commence à comprendre que chaque réflexion sur un peintre se prolonge en une réflexion sur l’être aimé.
Avec scepticisme au départ, je me suis plongée dedans car beaucoup d’envolées. Je ne connaissais pas le thème, j’ai eu le livre entre les mains comme çà et hop je l’ai lu d’une traite.
Je me suis replongée chemin faisant dans mes cours d’histoire de l’art. L’oeuvre mise en parallèle au sujet de l’écrivain est détaillée, de façon non académique mais plutôt philosophique sur le ressenti et les vibrations qui s’échangent lors du toucher. Je rejoins complètement Alexis Jenni lorsqu’il dit : » Le mot tout seul ne peut pas grand chose, mais le foisonnement de la phrase s’efforce d’y parvenir ». Lors de visites dans les musées, je suis comme lui, même si je suis tentée, je n’ai jamais déclenché les alarmes. Mais j’aime m’approcher et regarder de près le détail, la toile et ressentir, au delà de la simple superposition de traits et de couleurs, l’émotion comme un courant qui nous habite et crispent les mains.
» Quand je dis que la peinture se voit avec les mains, je ne suggère pas de toucher le tableau, … La main dont je parle n’est pas la main de chair c’est l’organe intérieur, une main virtuelle au plus profond de notre intime qui est le dépositaire du sens du toucher ».
Pierre Bonnard
De fait pour illustrer son propos, l’écrivain prend des exemples comme Bonnard que je partage volontiers avec lui. Un peintre pour qui la structure même bancale d’un tableau, communique avec le public par la couleur, la matière et l’empreinte sur la toile. Au fil des pages, on apprend une foule de détails illustrant le rapport du peintre à son modèle. La vie du peintre au travers de sa femme, Marthe…
Francis Bacon
Plus surprenant, il prend l’exemple de Francis Bacon que je n’apprécie pas particulièrement. J’ai eu envie d’en savoir plus sur le peintre et son oeuvre, l’hommage a été vibrant et j’ai été à l’unisson. Idem pour Picasso dont je partage le point de vue, mais qui donne à voir également comme dit Eluard.
Rembrandt
Là encore, la vie bourgeoise du peintre, nous est dévoilée, puis il ose une ode à la chair, aux couleurs, aux étoffes, du peintre flamand. On passera encore par Rodin et Poussin pour conclure ce tour des oeuvres d’art du musée idéal d’Alexis Jenni. Le musée qui l’inspire pour décrire sa bien-aimée.
Une belle déclaration d’amour faite par un homme à sa femme .