Il ne m’aura pas fallu plus d’une journée pour lire ce dernier livre de Tesson, mais pendant bien plus de jours je serai encore sous le charme de cette lecture. Oui je suis fan, de l’homme, de son système de pensée, et même du bagout de son père. J’ai eu la chance de le rencontrer lors de son récent passage en Aquitaine pour la promotion de son livre, juste deux mots le temps d’une dédicace.
Sur les chemins noirs est un récit qui débute par un pari avec lui-même : » Si je m’en sors, je traverse la France à pied. » Pour un homme affaibli par une série de déboires médicaux, consécutive à sa chute de 2014, cela tenait en effet de la gageure et en même temps comme le dit l’auteur d’une forme de thérapie. Le pari sera donc de traverser la France de l’hyper-ruralité à travers les chemins noirs c’est à dire ces petites lignes sur les cartes IGN au 1/25 000 ème, ces chemins invisibles, « ces tracés en étoiles et ces lignes piquetées étaient des sentiers ruraux, des pistes pastorales fixées par le cadastre.. » La traversée en partant de la gare de Tende près de la frontière italienne le 24 Aout, s’achèvera par la pointe du Contentin le 8 Novembre et sera parsemée de quelques rencontres, de compagnons de voyage et de réflexions sur notre monde altruiste et bruyant tandis que la campagne chère à Sylvain Tesson, belle endormie avec quelques vestiges de côté, rappelle une certaine grandeur de ce que fut la paysannerie.
L’auteur ne s’apitoie pas sur ses bobos, ni sa fatigue, tout au plus émaille-t-il le récit de sa mésaventure à l’hôpital d’Aurillac, mais au travers de la poésie des mots, de la légèreté des propos transparait un hymne au refus du monde hyper-connecté, et à la consommation excessive. Avec quelques formules imagées, il nous montre la laideur de l’ urbanisme occupant les zones péri-urbaines avec un sens littéraire bien senti mêlé à une large culture. Ce livre est un vrai bonheur, plein d’humour, d’auto-dérision et de phrases vraies qui font largement écho chez moi.